Aime-la cette vie. Bouleverse-toi d’elle. Pète-lui la gueule. Casses tout. Ça donne des ailes paraît… rêver ! Facile à dire ! Parfois il faut juste rendre ses rêves à l’évidence : tout s’en va en arabesques, en fuites. Il y a l’amer. Les moments maudits. Un mot, une pensée et… flouf ! petit bonhomme file au néant ! Toute la soupière envahie soudain de vampires. L’esprit c’est plus qu’un sous-bois plein de monstres, faut pas somnoler… vermines qui rampent, qui rongent… tout dans les ombres, dans les ronces. L’ombre, c’est la seule lumière qui reste. Gluante, visqueuse, étouffante. C’est plus fort que toute existence.


Les premiers froids d’octobre sont là, et quelques gouttes de soleil avec…
J’ai vu passer des troupeaux de grues. Alors je regarde passer… et le temps avec. Cafés et cigarettes. Oh, que c’est assommant de passer son temps à attendre ! J’effeuille des livres, je profite de l’absence de pluie pour tourner en rond. Je voudrais bien dessiner un peu mais la main refuse. Pourtant j’ai tout un tas de chouettes crayons plein d’alcool. Le petit ukulélé dort dans son placard… Lui aussi refuse… Ça va revenir ! Demain c’est pleine lune et je suis peinard dans ma piaule. C’est bon dêtre peinard. Reste à savoir ce que je vais en foutre de ma tranquilité… hurler avec les loups ?!

Parfois j’imagine un bon Dieu.
Un genre brave type sympathique qui a créé le monde mais qui très vite a été dépassé par les évènements. Il peut plus rien contre la guerre, la maladie, la dépression la mort et les méchantes choses qui font son monde. Pauvre vieux ! Et il faudrait l’aimer… parce qu’il doit être vachement malheureux. Tous les jours qu’il fait, ça doit pas le faire marrer de voir toute cette misère et de rien pouvoir faire pour y soulager… Je devrais peut-être lui suggérer de passer un peu de temps dans cet hôpital ou je tourne pas rond… Va savoir ! On regarderait passer les premières grues de l’automne… mais qu’il ne compte par sur moi pour croire en lui !!! Fichtre !



C’est une fatigue qui n’a pas de nom, de celle qui vient avec l’angoisse toujours recommencée. Ça réclame des acrobaties, des pirouettes et des tours de tartempion pour pas se laisser avaler. Le temps passe sans jamais vieillir lui. Il s’en moque. Mais ma binette à moi, elle prend les rides et les cernes et puis les coups. Et sans pouvoir les rendre encore. Cette fatigue, cet accablement c’est à se demander si ça va finir un jour. Ça fait flétrir grand train ! J’ai juste envie de dormir quelques éternités et m’éveiller un jour, pimpant ! En attendant : mettre les gants, aller boxer…

Elle est déjà vieille à quarante berges. Très con, aimable comme un bouton de fièvre et préposée au service du petit déjeuner. Moche et laide, faut voir comme… L’irréparable outrage n’y est pas allé de main morte… Toute osseuse et ridée, imbécile à vu d’œil et même d’aspect franchement bigote.

Ce matin elle a éclaté tout un bol de café juste en le regardant. Pile devant ma poire… ! Merci ma rombière ! Tu sais, moi j’ai le rire facile, naturel… l’embellie dans le fiel. Et heureusement : c’est pas tout le monde ! Les moments de joies sont, à notre image, mortels. Feux d’artifice d’artifices… mais ça me fait encore sourire ce soir !

L’esprit. La mélasse que c’est ce machin ! Et les questions qu’on me pose. L’esprit…
Pourquoi partout ça se déchire, se déglingue, se délite, s’en va pourrissant… ? Qu’est-ce que j’en sais moi ?! Je suis marqué peut-être ?! Que j’ai beau me débattre, ruser, baratiner avec le destin… de toutes les façons possible je me retrouve fleur ! Hors la vie, hors la beauté, hors le monde, hors la santé même. Du côté des ahuris. Du côté des lamentables et des funestes de quelques façons dont je me retourne. Avec le sourire encore, pour pas déranger. Et qu’on me pose des questions sans cesse et sans réponses…

Ca me débecte les questions ! On m’en a trop posé je crois. Et sur tous les tons encore… comme ça, brusquement, à brûle-pourpoint, bêtement, benoîtement, en chafouin, durement. Je voudrais une bonne fois pour toute réponse dire : merde !!!

Il pleut depuis deux jours. Et ce vent. Ce vent qui traîne tout un monde derrière lui, comme on emmène pisser son chien… Même les bougainvilliers ont les yeux gris. Octobre fait son octobre.
J’ai vu un ours danser avant de quitter l’hôpital et aller pisser contre un mur. Il est parti en ambulance… - STOP -

Somme toute, je suis gentil. Bon garçon, un brin chic, drôle, calme et croquignolet…
Fichtre !!! Si vous saviez ce que j’en pense !

Tout enfoncé dans une sale guerre contre une salope de croque-mitaine. J’imagine que ce sera mieux un jour, dans la paix… forcément ! Mais il est des instants ou je bouffe cet espoir-là comme un bonbon et puis que c’est rien quand même que de la merde. Que la guerre elle va pas finir. J’ose pas dire, pour dégoutter personne… mais j’y songe ! Un jour ça va gueuler. Je vais casser le morceau devant tout le monde, à commencer par la sainte famille.
Un jour on en a marre de tourner en toupie dans la merde. La mouscaille ça va cinq minutes !
Après… après le monde de me trouver bien mal élevé d’un coup.
Et puis c’est tout.